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Le verre, une histoire de souffle.

par | Jan 25, 2023 | Uncategorized | 0 commentaires

Le verre est né au bord d’un rivage, par accident.

La mère du verre, celle qui était là bien avant lui, nichée sous la terre et dans les volcans, c’est l’obsidienne. Une roche volcanique dont l’utilisation remonte à plus de 100 000 ans. On utilisait ce matériau robuste pour fabriquer des armes.

Environ 3000 ans avant JC, c’est au bord d’un rivage que le verre est né. Par accident.

Des voyageurs fatigués de leur périple en mer se sont arrêtés pour la nuit. Affamés, ils tentèrent de préparer leur repas dans un chaudron, posé sur un brasier.

C’est à partir de ce moment que les légendes divergent. Dans certains cas il est question d’une tempête qui empêche d’allumer le feu. Dans d’autres cas, c’est une soirée à douce brise qui précède la découverte. Je vous laisse voir avec vous-même quelle version vous conviendrait le mieux.

Ces voyageurs enfin repus s’endorment tranquillement, laissant les restes de leur dîner sans surveillance…

Durant la nuit, le vent a poussé le sable du rivage vers le chaudron. Mêlés au brasier encore chaud, ces grains de sable se sont métamorphosés. A leur réveil, les voyageurs ont découvert une matière inédite : visqueuse et opaque, chaude et difficile à toucher. Le verre était né.

Le verre, ce n’est pas seulement du sable. C’est surtout de la silice (élément qui compose le sable), de la soude qui permet de faire fondre la silice et de la chaux remplie de calcium qui va renforcer la composition du verre.

A ses débuts le verre était opaque. On le colorait à l’aide de poudres colorées. Pour l’anecdote, des petits brigands en ont profité pour développer un réseau de fausses pierres (comme la turquoise) qui étaient en réalité du verre coloré.

Les égyptiens ont maîtrisé le verre bien avant les occidentaux

Source: dreamstime.com

Les égyptiens de l’Egypte Antique étaient capables de produire leur propre verre. Les découvertes archéologiques font état de petites fioles de parfum, témoin du raffinement de l’art de vivre égyptien.  En plus du verre bleu, obtenu par ajout d’oxyde de cobalt, ils étaient en mesure de fabriquer du verre rouge, obtenu grâce à un ajout d’oxyde de cuivre.

L’obtention de cette teinte nécessite une réelle maîtrise technique (c’est encore le cas aujourd’hui : le verre rouge est plus onéreux et plus difficile à produire en raison de sa composition chimique). Les verriers égyptiens possédaient de grandes compétences et occupaient une position stratégique dans la création et le commerce du verre.

Les romains ont capitalisé sur les techniques verrières

L’empereur Auguste, fondateur de l’empire romain, est gourmand de conquête : cette Egypte puissante et raffinée constitue l’une d’entre elles.  En guise de tribut de guerre, l’empereur exige des objets en verre, dont la valeur marchande et culturelle est très élevée. Le verre est une monnaie d’échange, mais aussi un baromètre de la puissance.

Quarante ans plus tard, l’empereur Tibère ordonne aux verriers égyptiens de venir s’installer sur le sol de l’empire romain : les savoir-faire autant que les objets sont alors le moyen d’asseoir le pouvoir. Rome ne va pas seulement constituer un butin de guerre, elle va développer et diffuser les arts verriers : le premier âge d’or du verre débute et durera plus de 4 siècles.

Le verre de Venise attise les convoitises

Qui dit verre, dit…Venise ! A la manière des romains, Venise n’hésite pas à aller chercher la maîtrise technique là où elle se trouve. C’est-à-dire à Constantinople, l’une de ses colonies.

L’ajout de nouvelles techniques participe à l’amélioration des objets fabriqués. Le verre vénitien, ainsi étoffé, se vend à merveille à travers toute l’Europe et suscite la convoitise. Afin de conserver son monopole, la République de Venise met en place des mesures de protections très sévères. Gare à celui qui oserait partager les secrets du verre : peine de mort et menaces sur la famille du « traitre » étaient prévues en cas de désobéissance.

Certains verriers refusaient de partager leurs secrets…

Au même moment, à la Cour royale de Versailles, on ne sait pas fabriquer les miroirs en grandes dimensions. L’importation est très couteuse et le mot d’ordre est : autonomie industrielle. Colbert, ministre des finances de Louis XIV fait espionner les maîtres verriers vénitiens : il parvient à faire venir certains d’entre eux, contre des exemptions d’impôts ou de fortes sommes d’argent. Certains finiront empoisonnés au mercure (composant du miroir) par leurs maîtres vénitiens…

Manufacture royale de glaces de miroirs.
Source: proantic.com

En 1665, Louis XIV crée la Manufacture royale de glaces de miroirs. Certains verriers vénitiens y furent engagés mais la collaboration se révéla houleuse : les verriers refusaient de transmettre leurs secrets et ils passaient beaucoup trop de temps à profiter du « Paris de la nuit »… !

La Manufacture finira par les renvoyer à Murano. La France importe encore du verre vénitien, jusque dans les années 1670. 25 ans plus tard, la France a atteint son objectif : elle exporte son verre à travers l’Europe et Venise perd son monopole industriel.

Le verre nous parle des progrès humains.

Les verriers et leurs productions ont de tout temps fait tourner les têtes des puissants. Bien souvent associé à une symbolique de pouvoir, de prestige et d’argent, le verre est propice à la recherche scientifique. La verrerie laborantine a trouvé dans le verre un allié idéal pour ses expérimentations. Transparent, non déformable et résistant aux températures élevées: le verre répond aux contraintes de la recherche.

En 1930, la fibre de verre est brevetée. Elle donnera naissance à la fibre optique, brevetée en 1960.  Ce fil de verre, très fin, permet de conduire la lumière et les données numériques sur de longues distances. Ces signaux lumineux codés constituent l’essentiel de nos modes de communication numériques : télévision, téléphonie, radio, internet. Votre présence ici doit donc beaucoup au verre et à son incroyable potentiel !

« Le verre est la plus merveilleuse et la plus utile des découvertes depuis celle des métaux ».

Denis Diderot, Encyclopédie.

D’un grain de sable porté par le vent, le chemin parcouru par le verre fut long et périlleux. Cette légende poétique explique peut-être pourquoi le verre est une matière mystérieuse qui dialogue si facilement avec la lumière.

Il lui fallait naître au cœur de la nuit pour ensuite nous parler sans cesse du jour qui naît.

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